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La pasteure Kimberly Heath, candidate au poste de modératrice

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Portrait : Kimberly Heath
La pasteure Kimberly Heath
Credit: PhotoVisions Photography Co.

Elle/elle

Pasteure, nommée par le Conseil régional de l’Est de l’Ontario et de l’Outaouais

J’habite au bord du fleuve Saint-Laurent, près d’une partie étroite où il est difficile de naviguer. À cet endroit, la voie maritime traverse les Mille-Îles, où se trouvent parfois des hauts-fonds cachés. C’est pourquoi les énormes cargos lourds qui passent par-là doivent remettre leurs roues à un pilote local.

Il semble que les défis auxquels est confrontée notre Église Unie soient comparables, qu’il s’agisse de la diminution des ressources ou des attaques de groupes d’extrême droite (deux situations auxquelles j’ai personnellement fait face). Je me sens appelée à jouer ce rôle de capitaine, c’est-à-dire à guider l’Église en inspirant une spiritualité profonde, une vie de disciple dynamique et une quête audacieuse de justice, et à suivre Jésus, le grand capitaine de mon destin.

Je suis née à Lusaka, en Zambie, et j’ai grandi dans de petites villes canadiennes. J’ai étudié l’histoire à l’Université McGill et j’ai décroché une maîtrise en théologie de l’Emmanuel College avant mon ordination en 1999. Pasteure depuis 25 ans, j’ai commencé ma carrière auprès des membres de la Claresholm-Stavely Pastoral Charge, dans une région rurale du sud de l’Alberta. Depuis 2007, je suis au service des membres de la Wall Street United Church, dans l’est de l’Ontario.

La prédication a été le sujet central de mon doctorat en études pastorales, qui a duré trois ans. Ma thèse intitulée « Aware, Repair, Renew: Preaching Into Transformation in a Mainline Church » (Conscientiser, réparer, renouveler : prêcher la transformation au sein d’une église traditionnelle) m’a permis d’approfondir ma compréhension du pouvoir de transformation, à la fois en nous-mêmes et dans le monde, qui découle des petits gestes posés et des légers changements apportés.

Au sein de l’Église au sens large, je suis notamment responsable des relations pastorales du Foothills Presbytery, j’assure la présidence du Synode Baie de Quinte et je participe aux travaux de la Commission de transition du Conseil régional de l’Est de l’Ontario et de l’Outaouais. En outre, je contribue régulièrement à inspirer les leaders de l’Église et à nourrir leur foi lors de retraites, de conférences sur la prédication et d’ateliers destinés au personnel ministériel.

Ma famille, que l’on appelait à une époque le « chaos-en-fourgonnette » dans la région, est composée de mon mari, de ma nièce, de notre chien blanc bien poilu et de quatre enfants âgés de 15 à 26 ans. Je suis bilingue et j’aime lire, faire de la voile et, surtout, nager en eau libre; il y a beaucoup de houle lorsque les cargos passent, mais cela ne me gêne pas.

Appel et vision 

En tant que modératrice, je contribuerai à renforcer l’Église en approfondissant la foi en Jésus, en solidifiant les petites choses et en encourageant l’établissement de relations vivifiantes.

Lorsque je réfléchis à l’avenir de notre Église, je m’imagine seule sur une plage. Un tsunami se dirige vers moi. Il n’y a aucun moyen de l’éviter. Je me sens toute petite, je suis effrayée et j’éprouve un sentiment d’impuissance.

Nous traversons une période éprouvante marquée par la crise climatique, les difficultés économiques et la montée du fascisme et de la haine envers les personnes queer et trans, les personnes de couleur et les personnes immigrantes. En outre, en tant qu’Église, nous sommes confrontés à un déclin dont le rythme est alarmant. Pour beaucoup, le christianisme appartient au passé.

Les choses ont bien changé! Lorsque celles et ceux qui nous ont précédés ont célébré la naissance de notre Église, en 1925, le potentiel et l’enthousiasme face à l’avenir étaient grands. Nous nous sommes ensuite attaqués à la pauvreté à l’échelle du pays et au fascisme à l’étranger. Pendant des décennies, nous avons grandi, grandi et grandi. Si l’Église de 1925 n’avait sans doute pas envisagé la réalité d’aujourd’hui, nous avons aussi évolué au-delà de ce qu’elle aurait pu imaginer. Les espoirs et les rêves se sont concrétisés d’innombrables façons, notamment par l’ordination des femmes et des membres de la communauté 2ELGBTQ+.

Nous avons également beaucoup appris, souvent à nos dépens. Terriblement lentement, nos yeux se sont ouverts. Notre Église a fini par accepter la triste réalité concernant sa participation au colonialisme et au nationalisme chrétien, compte tenu du rôle direct qu’elle a joué dans le système des pensionnats et le génocide culturel des peuples autochtones. Puis, nous nous sommes mis au travail : pour nous ouvrir encore davantage les yeux, pour voir ce que nous n’avions pas vu auparavant, pour nous engager sur le long chemin vers la réconciliation, en remettant en question nos croyances et en faisant une place aux personnes marginalisées.

À l’aube de notre deuxième siècle d’existence, quel est l’appel de l’Église Unie du Canada?

Une spiritualité profonde

Pour relever les défis de notre époque, nous devons approfondir notre foi, car nous n’y arriverons pas seuls. Le théologien Howard Thurman, militant pour les droits civils et mentor de Martin Luther King, a parlé d’une ancre qui peut nous empêcher d’être emportés par le courant. « Nous avons une ancre qui donne à l’âme une force inébranlable et stable alors que les flots déferlent… » (We Have an Anchor [Nous avons une ancre], Priscilla J. Owens; traduction). Notre appel en tant que leaders de l’Église est d’aider les membres, les communautés de foi et les personnes à l’extérieur de notre organisation à connaître l’espoir qui peut naître d’une relation transformatrice avec Jésus. Les gens aspirent à s’enraciner dans un amour plus profond et à découvrir des pratiques spirituelles anciennes qui contribuent à étendre les racines de la paix et les branches de la force et de la justice.

« Nous ne sommes peut-être pas grands, mais nous sommes petits! » – Stewart McLean (traduction)

Nous sommes plus petits qu’avant et cette tendance devrait se poursuivre. Plutôt que de craindre cette situation, il est temps de l’accepter. Pourquoi? Parce que c’est notre réalité et que Dieu semble aimer ce qui est petit. Il suffit d’un peu de levure pour faire lever le pain. Il suffit d’un peu de sel pour assaisonner un plat ou irriter sévèrement un œil. Que nous pensions à David et Goliath, à Gédéon et aux Madianites, à une graine de moutarde ou à un petit groupe de disciples parfois compétents, Dieu donne de la vitalité et du courage à ce qui est petit. Que faites-vous pour changer les choses à petite échelle? Tricotez-vous un châle de prière? Priez-vous pour quelqu’un? Sensibilisez-vous les gens à l’histoire de la Palestine? Parrainez-vous un réfugié ou une réfugiée?

Relations porteuses de sens

Nous vivons dans un monde profondément déconnecté. Nos liens tribaux (principalement en ligne) sont solides. Ils nous permettent de rester informés et de nous sentir unis, mais ils tracent aussi des lignes claires indiquant qui est inclus et qui ne l’est pas. Nous avons presque perdu ce que certaines personnes appellent le troisième espace et d’autres, le village. Une grande partie du village a disparu depuis que nous faisons nos achats sur Internet, utilisons les services bancaires en ligne et allons chercher des repas à emporter. Cela pose un énorme problème, car c’est au village que nous apprenons à être gentils et tolérants envers les personnes qui sont différentes de nous. C’est aussi là que nous apprenons à être vulnérables et courageux en acceptant pleinement qui nous sommes réellement. Les Églises peuvent être des lieux essentiels où des personnes d’âges, de cultures, de races, d’identités sexuelles et de milieux socioéconomiques différents peuvent se rassembler, établir des liens et intégrer une communauté. Des liens significatifs peut tout à fait se créer en ligne, mais nous devons travailler y parvenir.

Lorsque j’ai marché sur le Camino en Nouvelle-Écosse, Dieu a transformé l’image du tsunami pour moi. J’ai acheté une petite pierre peinte dans une petite église où nous avons séjourné. Elle porte l’image d’un véliplanchiste surfant sur une vague gigantesque. J’ai continué de marcher, en gardant ce petit caillou dans ma main et en pensant à cette image. Puis j’ai entendu Jésus m’inviter à ne pas avoir peur et à embarquer dans l’aventure, à sentir le vent dans nos voiles, à naviguer avec lui sur les eaux agitées. Le véliplanchiste, comme l’Église, est minuscule par rapport à l’océan houleux, mais la peur se transforme en excitation lorsque nous apprenons à faire confiance à la relation qui existe entre la planche, la voile, le vent et l’eau. « Tu as vogué sur les eaux, ton appel a rejoint les profondeurs… Esprit d’agitation, sors-moi de cette placidité, vent, vent sur la mer » (Spirit of Gentleness [Esprit de douceur], James K. Manley; traduction).

L’appel et la vision de l’Église Unie du Canada ont beaucoup changé au fil des ans, mais les choses, elles, n’ont pas changé du tout. Je n’ai aucune idée de ce à quoi ressemblera l’Église Unie du Canada en 2125; ce ne sera probablement pas ce que nous imaginons, mais, par la grâce de Dieu, nous serons exactement ce que nous sommes appelés à être. Plus que toute autre chose, en tant qu’Église, nous sommes appelés : appelés par Dieu à nous engager dans le mouvement, dans la résistance, dans la vie. Nous sommes appelés à constituer l’Église :

   pour célébrer la présence de Dieu,
   pour vivre avec respect dans la création,
   pour aimer et servir les autres,
   pour rechercher la justice et résister au mal,
   pour proclamer Jésus, crucifié et ressuscité,
      notre juge et notre espérance.

(La Confession de foi, 1968)