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GC44 Rapport provisoire sur l’adoption d’une approche fondée sur des principes pour encadrer le travail de justice de l’Église Unie du Canada pour octobre 2024

Contexte

L’exécutif du 42e Conseil général a reçu le rapport intitulé Towards Peace in Palestine and Israel : A Call to Costly Solidarity [Le soutien d’une paix juste en Palestine et en Israël : un appel à une solidarité exigeante] (PMM20) la proposition appelait à la mise en place d’un processus d’examen de la politique de l’Église en ce qui concerne la Palestine et Israël à la lumière de l’évolution de la situation et des appels à la solidarité de partenaires de l’Église. En novembre 2018, l’exécutif du 43e Conseil général de l’Église Unie du Canada a nommé un groupe de référence formé de quatre personnes pour :

  1. entreprendre un examen des politiques actuelles de l’Église Unie du Canada relatives à la Palestine et à Israël à la lumière de la situation actuelle et des demandes de ses partenaires ;
  2. recueillir les points de vue des membres de l’Église Unie, des partenaires et d’autres organisations pertinentes ;
  3. conseiller l’exécutif du Conseil général et lui faire des recommandations.

En s’inspirant des demandes des partenaires de l’Église, l’équipe a décidé de répondre à trois éléments spécifiques qui posaient des problèmes dans la politique existante :

  1. le mouvement Boycott, Désinvestissements et Sanctions (BDS) ;
  2. l’utilisation du terme « apartheid » en lien avec Israël ;
  3. les implications d’une politique de l’Église Unie appuyant le droit d’Israël d’exister en tant qu’État juif.

Depuis des décennies, l’Église Unie utilise une approche fondée sur la politique pour encadrer son travail de justice et de défense de la justice. Pour la plupart, les politiques reflètent une période particulière de l’histoire et sont limitées par les réalités de l’époque. Les changements de politiques sont souvent lents en raison des processus de gouvernance en place. Dans des contextes dynamiques et changeants, les déclarations politiques faites à des moments précis se trouvent en décalage avec les appels des partenaires et avec les réalités mondiales qui évoluent rapidement. De plus en plus, en raison de l’évolution du contexte mondial et politique ainsi que des demandes des partenaires et des organisations de la société civile, l’Église Unie éprouve des difficultés à réagir du fait des restrictions de ses politiques (rapport TICIF 02).

Près de trois ans après avoir entamé le travail, le groupe a compris qu’il fallait définir un ensemble de principes permettant d’orienter les décisions pratiques et les décisions en matière de politique prises par l’exécutif du Conseil général et par le personnel du Bureau du Conseil général chargé de se pencher sur ces questions. L’idée était notamment d’aborder les choses dans une perspective de décolonisation.

Le groupe de travail a remis son rapport à l’exécutif du 43e Conseil général, qui l’a transmis au 44e Conseil général (2022). Le Conseil a également reçu une série de propositions au sujet de la Palestine et d’Israël.

GCE03 Une approche du travail pour la justice au sein de l’Église Unie du Canada fondée sur des principes

GCE04 Une paix juste en Palestine et en Israël

Ainsi que les propositions suivantes des conseils régionaux, qui ont été examinées collectivement : CS01, SW09, FSL01, PM02, RC1501, SW02

Les travaux réalisés par le groupe et le rapport qu’il a transmis ont donné lieu à la proposition GCE04 Une paix juste en Palestine et en Israël. On y demande à l’Église d’accepter d’adopter une approche fondée sur des principes pour encadrer son travail en Palestine et en Israël et on y suggère plusieurs principes qui pourraient être appliqués pour déterminer les actions de défense de la justice et les énoncés de politique qui conviennent et pour répondre aux demandes concrètes de ses partenaires ou d’autres organes. La proposition n’exige pas de l’Église qu’elle prenne des mesures particulières si ce n’est d’appliquer en continu ladite approche. Cette proposition a été reportée de manière définitive jusqu’à ce qu’un ensemble de principes puisse être établi (voir GCE03 Une approche du travail pour la justice fondée sur des principes). Le Conseil a également décidé de reporter de manière définitive les six propositions régionales (CS01 Justice et paix en Palestine et en Israël, SW09 Justice et paix pour la Palestine et Israël [nouvelle proposition], FSL01 Réponse à l’appel de notre partenaire mondial Kairos Palestine, PM02 Un engagement vivant envers le Cri d’espoir lancé par KAIROS Palestine, RC1501 Réponse à l’appel de notre partenaire mondial Kairos Palestine, SW02 Faire entendre notre voix pour les droits de la personne) jusqu’à ce que les travaux concernant les principes soient terminés et que ces derniers soient soumis à approbation (compte rendu, p. 107).

Le Conseil général a chargé le Comité théologie et relations interconfessionnelles et interreligieuses d’élaborer des principes en vue de l’assemblée annuelle du 44e Conseil général, qui s’est tenue en octobre 2023. Les principes ont été approuvés en principe pendant l’assemblée par le 44e Conseil général, qui a autorisé leur application et demandé que des principes révisés (établis en tenant compte des enseignements tirés de l’application des principes actuels) soient soumis pour examen au 45e Conseil général (2025) aux fins de leur potentielle adoption complète.

L’idée est que l’adoption d’une approche fondée sur des principes permettra à l’Église de répondre plus rapidement aux situations d’injustice tout en étant guidée par un cadre cohérent. Les principes orientent et guident le personnel et les comités nationaux dans le travail de l’Église en faveur de la justice et de la plénitude de vie.

Les principes tels qu’ils ont été adoptés sont intentionnellement interdépendants et s’appuient sur les politiques, les affirmations et les engagements de l’Église Unie. Ils orientent et guident le personnel et les comités nationaux dans le travail de l’Église en faveur de la justice et de la plénitude de vie. D’autres conseils, le personnel, les personnes laïques et le personnel ministériel de l’Église Unie peuvent choisir de s’inspirer de ces principes pour guider leurs propres discours et actions (TICIF 02).

Le rapport et la préface de la motion donnent au personnel national et aux comités nationaux des orientations quant à la manière d’appliquer les principes sans autoriser expressément l’adoption de mesures concernant le mouvement BDS et le terme « apartheid ». Vu la situation changeante qui prévaut en Palestine et en Israël, l’approche fondée sur des principes présente des avantages évidents.

Le problème est que :

  1. Le Conseil général a adopté une approche fondée sur des principes qui vise à permettre au personnel de répondre rapidement aux préoccupations en matière de justice ;
  2. Il a AUSSI tenu des discussions dans lesquelles il a exprimé un malaise par rapport à certaines interventions et décidé que le Conseil général lui-même (et non son personnel) examinerait la question d’une paix juste en Palestine et en Israël.

Appliquer les principes de justice au plaidoyer concernant la Palestine et Israël

Quand la guerre menée par Israël contre Gaza s’est intensifiée, après les attaques commises le 7 octobre 2023 par le Hamas, l’Église a pu s’appuyer sur les principes de justice pour faire pression de manière plus réactive et efficace sur le gouvernement canadien, ce que la politique qu’elle avait définie à cet égard, plus statique, ne lui permettait pas de faire. Compte tenu de l’absence de réaction du Canada face aux violations du droit international commises par Israël, lui qui n’avait pourtant pas hésité à prendre des mesures dans le cas du Myanmar et de la Russie, l’Église s’est senti le devoir de mener un vigoureux plaidoyer et d’ainsi réaffirmer son appui à la primauté du droit international. Le Canada n’a pas respecté les obligations que lui impose la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre à la suite des bombardements commis par Israël contre des cibles civiles (hôpitaux, écoles et camps de réfugiés) et contre des zones que les forces de défense israéliennes avaient elles-mêmes désignées comme étant « sûres ». Vu les déclarations génocidaires faites par le gouvernement israélien et les multiples crimes de guerre perpétrés par l’armée, tels que décrits dans l’ordonnance de la Cour internationale de justice, qui qualifie de plausible l’allégation d’actes génocidaires commis par Israël à Gaza, l’application des principes a permis à l’Église de recommander au Canada d’imposer un embargo sur le commerce des armes avec Israël et de suspendre ses relations diplomatiques et économiques avec cet État.

Tirer des leçons de l’application des principes

En discutant avec des membres du personnel qui ont eu l’occasion d’appliquer les principes dans diverses situations ainsi qu’en réponse à des demandes de nos partenaires, les membres du Comité théologie et relations interconfessionnelles et interreligieuses ont tiré les enseignements suivants :

  • Les principes sont plus flexibles et permettent de mieux s’adapter au contexte ; l’Église peut ainsi réagir plus rapidement dans un contexte en constante évolution et dans des situations complexes sur le terrain.
  • Les principes privilégient le vécu et les expériences des partenaires avec qui nous travaillons.
  • Les principes nous permettent de répondre à des situations pour lesquelles nous n’avions pas de politique en place.
  • L’Église doit s’efforcer d’appliquer les principes à des demandes concrètes formulées par des personnes qui ont des avis divergents sur la question. Cela nous aidera à écouter l’autre, voire à commencer à développer une compréhension mutuelle, ainsi qu’à engager de bonne foi des discussions sérieuses sur le sujet.
  • La question des principes doit être abordée avec la constituante autochtone de l’Église pour savoir comment ils sont perçus et compris et quelles sont les réflexions qui sont menées à leur sujet.
  • Le texte des principes doit être plus accessible et moins verbeux.
  • Il faut s’interroger à savoir à qui appartient la « voix » que les principes expriment.
  • Les principes nous appellent à poursuivre le travail de décolonisation, qui est loin d’être terminé.
  • Les principes sont interconnectés et ne peuvent être considérés isolément ; cet élément doit être plus clairement énoncé.

Lutter contre l’antisémitisme et le racisme antipalestinien

Le Groupe de travail sur la lutte contre l’antisémitisme a été établi peu après le 44e Conseil général (2022). Il est composé de membres de la Table commune sur l’antiracisme et du Comité théologie et relations interconfessionnelles et interreligieuses. Le Groupe a créé des ressources éducatives (notamment un cours accessible sur CarrefourÉglise, des publications sur le blogue Round the Table, une section sur le site anglais www.united-church.ca et une célébration liturgique du Vendredi saint) pour exécuter son mandat, qui est d’éliminer de la théologie et du culte chrétiens toute trace d’antisémitisme. Plus tôt cette année, après que cette partie du travail eut été accomplie, le Groupe a terminé ses travaux. Il reste cependant indispensable de poursuivre les efforts de lutte contre l’antisémitisme.

D’autres activités de sensibilisation sont prévues à la fin de 2024 et pendant la première moitié de 2025. L’objectif est d’inciter l’Église à repérer toute trace d’antijudaïsme et d’antisémitisme dans la façon de lire et d’interpréter les Écritures ainsi que dans la théologie et les cantiques. L’un des événements en direct organisés dans le cadre des 40 jours d’action dans la lutte contre le racisme, intitulé Les textes de l’Avant : trouver la Bonne Nouvelle et éviter l’antisémitisme, sera animé par Amy-Jill Levine. Il aura lieu le 19 novembre 2024 et se déroulera en anglais et en français. Il est prévu de créer d’autres occasions d’apprentissage pendant la seconde moitié de 2025 et en 2026 pour aider les membres de l’Église à participer à la lutte contre l’antisémitisme.

Perspectives d’avenir

Le Conseil général devra répondre aux propositions qu’il a reportées de manière définitive. Selon ce qu’il décide de faire, on pourrait avoir l’impression qu’il revient à une approche fondée sur des politiques concernant la question de la Palestine et d’Israël et que la politique qu’il définit à cet égard est en décalage avec sa propre décision d’employer une approche fondée sur des principes pour aborder les questions de justice. Mise à part la contradiction interne que cela représente pour le Conseil général, cela soulève également la question de savoir quels sujets relèvent de la responsabilité du personnel et de celle du Conseil général. Cela pourrait avoir pour effet de ralentir le processus, ce que l’approche fondée sur des principes tente précisément de résoudre. Le secrétaire général, en tant que membre du personnel-cadre et responsable administratif du Conseil général, de son exécutif et de son sous-exécutif (Le Manuel D.4.2.3), a reçu deux séries d’instructions :

  1. Le Conseil général, lorsqu’il a reçu et adopté le rapport TICIF 02, le 21 octobre 2023, a mis en place un processus qui exige du secrétaire général qu’il réponde aux nouveaux enjeux en matière de justice ;
  2. Le Conseil général a simultanément signalé son intention de se pencher lui-même sur le sujet en s’appuyant sur la synthèse que l’équipe de médiation a établie à la suite des groupes de discussion et de la décision de revenir sur le sujet d’une paix juste en Palestine et en Israël au moyen des propositions reportées.

Certaines franges de l’Église attendent avec impatience que des mesures soient prises à cet égard (comme en témoignent la correspondance et une autre proposition sur le sujet soumise en mai 2024 à l’exécutif du Conseil général par une personne déléguée et présenté au Conseil général sous le titre NEW 04 Join the Apartheid Free Communities Movement), mais il n’est pas clair si le secrétaire général doit agir sur la base des principes énoncés ou si le Conseil général souhaite agir lui-même sur la question sur la base des principes. Le présent rapport appelle l’attention du Conseil général sur le dilemme posé par ses deux décisions, qui concordent toutes deux sur les avantages que représente l’application d’une approche fondée sur des principes pour encadrer le travail de justice au sein de l’Église Unie du Canada, mais qui présentent des informations contradictoires sur la question de savoir à qui incombe la responsabilité d’appliquer les principes concernant une paix juste en Palestine et en Israël.

Ainsi, pour que les travaux sur la question puissent aller de l’avant, il faut clarifier qui sont les personnes ou les entités autorisées à appliquer l’approche fondée sur des principes pour encadrer le travail de défense de la justice au sein de l’Église Unie, en particulier en ce qui concerne l’occupation et la guerre en Palestine.

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